Héro(s)
Au cœur de l’héroïne
Claire Duport
Un abécédaire de la blanche. De « A pour amour » à « Z pour Za’ma », une myriade d’histoires, qui nous plongent au coeur de l’héroïne.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’héroïne – raconté par ceux qui l’ont vécue. Pourquoi l’appelle-t-on la reine des drogues ? Est-ce qu’on devient toujours accro ? Comment elle a été inventée ? Comment on vit avec ?
Un flash d’humanité. Des histoires de fêtes, de virées, de fêlures, de travail trop dur, de grand amour, de plaisir, de rires et de larmes, de solitude et de bandes. Qui, depuis Marseille, nous emmènent à Paris, Saint-Denis, Baltimore ou Katmandou, jusqu’aux routes du Liban et du Proche-Orient.
Un concentré de mondes. Au carrefour de l’histoire des musiques, de la libération des moeurs, de la quête de soi, de la chimie, de la santé, de la géopolitique, c’est la société tout entière qui se donne à lire dans nos histoires d’héroïne.
On en parle
Écouter le plateau-radio de la soirée de lancement du livre et du film sur Radio Grenouille
Sommaire
Prélude
A pour Absents
A pour Amour
B pour Baumettes
B pour Bricolages
C pour Cycles
D pour Dépendance
D pour Diacétylmorphine
É pour Église
E pour Extraits
F pour Flash
G pour Griffonné
H pour Heureuse
I pour Interdit
J pour Javel
K pour Katmandou
L pour Liban
M pour Morts
M pour Musiques
N pour No Future
O pour Orgasme
P pour Passeport
Q pour Quartiers
R pour Réduction des risques
R pour Rire
S pour Salle de shoot
S pour Scène ouverte
T pour Toxicomanies
T pour Trafics
U pour Université
V pour Virée
W pour The Wire
X pour Anonyme
Y pour Yazid
Z pour Za’ma
Postface de Jean-François Mattei
Épilogue de Michel Peraldi
Bonus
Extrait
Prélude
C’était l’été 1980. Sur la plage de la Concha, à une encablure de l’appartement sous les toits où nous rentrions au petit jour, le délire nocturne se poursuivait jusqu’à ce que les premiers baigneurs viennent déloger les derniers échoués de la nuit : fêtards comme nous, poussés de la parte vieja après la fermeture des tavernes, routards de passage qui avaient élu domicile sur cette plage pour quelques jours ou quelques semaines, zonards des quartiers pauvres quittant leur bas d’immeuble le temps d’une virée, ou jeunes de bonne famille venus s’encanailler avec un dernier bain de minuit… Tous des échoués de la nuit, avec les restes de l’épave : le calimotxo, ce mauvais vin mélangé au Coca qui monte à la tête plus fort et plus vite que n’importe quel alcool, les pétards qui
tournent aussi simplement qu’une rumeur, et l’héroïne. Il se disait déjà qu’elle faisait des ravages ; on prenait ça pour une idée reçue, une de plus.
Presque trente ans plus tard, c’est à Marseille que je retrouve l’héroïne. Au détour d’une conversation, les responsables de la mission Sida-Toxicomanies de la Ville disent : « Marseille a payé un lourd tribut à l’héroïne ; il faudrait un jour en raconter l’histoire, laisser trace… » C’est comme une invitation, qui va cheminer dans mon travail de sociologue, et le nourrir, jusqu’à ce livre.
Dans ce livre, tout vient d’aujourd’hui, mais s’est passé des années 1968 à 2000, à partir de Marseille. Ces années-là, parce qu’elles flânent depuis la fin d’une légende qu’on a appelée la French Connection, et qui marque le début de la diffusion massive de l’héroïne en France, jusqu’à sa régression à la fin des années 1990. Et souvent Marseille, parce que l’héroïne est comme un personnage récurrent de l’histoire de cette ville, plus que de toute autre : dans les romans, les films, les représentations et les réputations, mais aussi dans la vie.
Les héros de l’héro, ce sont les usagères, les usagers, celles et ceux qui ont cheminé et cheminent à son côté. Et tout près d’eux, celles et ceux qui pensent que leur histoire est aussi notre histoire.